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samedi 23 février 2013

Special Edition. Verchain's featuring for The Blue Pennant



WE HAVE SUFFERED ENOUGH’

Nous avons assez souffert. C’est sur ces mots, ou presque, que se termine le communiqué de Donna Shalala (qui a un nom marrant), la présidente de l’Université de Miami, en réponse à la Notice of Allegations (NOA, qu’on pourrait traduire par ‘annonce des reproches qui sont faits’) envoyée mardi soir par la National Collegiate Athletics Association (NCAA) à la fac de Floride du Sud.

Vous vous souvenez sans doute, si vous avez un peu de mémoire et/ou que vous êtes un de ces vieux lecteurs de The Blue Pennant, qu’un certain blogueur un peu fou et pas drôle du tout avait exposé, il y a déjà deux ans et demi de ça, que l’Université de Miami était l’objet d’une enquête de la NCAA relative à de nombreux ‘Impermissible Benefits’ (c’est ainsi qu’on dénomme tout type de rémunération directe – en cash - ou indirecte – des avantages en nature - des étudiants-athlètes) accordés à des anciens joueurs de Miami, à des coachs, par un ‘booster’ (c’est ainsi qu’on surnomme les donateurs d’un programme athlétique universitaire) nommé Devin Shapiro. Et bien entendu, également, sur le fait de savoir si oui ou non les autorités de la fac (présidence, direction athlétique, etc…) savaient ce qu’il se passaient et se sont sciemment tus, ce qui est contraire à tous les règlements de la NCAA.


Histoire extrêmement savoureuse, qui avait valu au dit blogueur sa première publication sur ce vénérable site. Il y était question de fiestas monstrueuses, de rémunérations en fonction des performances (voire même de primes à la chasse de tête pour certains défenseurs, ce qui rappellera sans doute de bons souvenirs à nos amis supporters des Saints de la Nouvelle Orléans du côté des pros), de strip teaseuses, et même d’un peu plus que ça. Nous dénommerons ce ‘un peu plus’ comme étant les services de ‘travailleuses du sexe’, pour ne pas choquer notre lectorat le plus puritain.

Il y a des années, Nevin Shapiro militait déjà
en faveur du mariage pour tous...

L’enquête de la NCAA a donc duré deux ans et demi sur ces faits supposés, mis au jour dans un article de Charles Robinson sur Yahoo Sports, et révélés par le supposé ‘corrupteur’ lui-même, Nevin Shapiro. Rappelons à ceux qui l’auraient oublié que Shapiro était déjà, avant même ses révélations, sous le coup d’une condamnation pour escroquerie à grande échelle, pour avoir été à la tête d’un réseau pyramidal (en gros ce qu’on a reproché à Bernard Madoff, pour fixer les idées).

Et donc, la NOA est tombée. Boum. Nous ne savons pas encore à ce jour ce qu’elle contient exactement, puisque, attendu que l’Université de Miami n’est pas une institution publique, les éléments contenus dans la NOA ne doivent pas, légalement, obligatoirement être rendus publics (ce qui est différent pour des facs financés par des fonds publics, comme par exemple Ohio State ou Penn State…). Quelques fuites ont été publiées dans la presse, et l’Université du Missouri, où exerce maintenant l’ancien coach des basketteurs de Miami qui était visé par l’enquête de la NCAA, a publié la NOA concernant ce monsieur, Frank Haith, qui a été l’objet d’un chantage de la part de Shapiro, auquel il se serait soumis au lieu de rapporter, comme le veut le règlement, sa situation aux autorités de la fac, mais nous ne sommes pas là pour parler de basket…

Ce que doit contenir la NOA, pour ce qui concerne directement la fac de Miami, c’est une accusation de financement direct ou indirect de joueurs, en activité au moment des faits ou en phase de recrutement, et, allez savoir, peut-être même une accusation de ‘failure to monitor’ (manquement dans l’encadrement des pratiques des joueurs, coaches, boosters, de la part du département des sports et de la présidence de l’université), ou plus probablement un ‘lack of institutional control’, qui est encore pire, dans le fond, en termes de sanctions potentielles (USC a été sanctionnée sous le régime du 'lack of institutional control')… C’est une supposition, bien entendu, puisque nous ne connaîtrons sans doute pas le contenu complet de la NOA avant la réponse formelle de l’université aux allégations de la NCAA. Différents articles mentionnent le vocable de 'lack of institutional control'. 

Le vrai problème autour de cette NOA ? Ce sont les méthodes employées par la NCAA pour aboutir aux accusations alléguées, et donc à de futures sanctions à l’encontre de l’Université de Miami. Par rapport à cela, Donna Shalala et son nom marrant ont joué un coup de communication absolument magistral.

Les méthodes de la NCAA ? Des trucs à la limite du bush league, des choses qu’on voit généralement dans les films ou dans les romans de John Grisham.

La NCAA a reconnu avoir rémunéré l’avocate de Nevin Shapiro pour qu’elle fournisse des témoignages issus d’une autre affaire que celle qui nous occupe (rien à voir avec le sport, de la banqueroute frauduleuse) qui pouvaient être utilisés pour confirmer certaines des accusations portées dans le cadre de l’affaire UM-Shapiro. Ceci est bien évidemment contraire à l’éthique, et à quelques règlements de la NCAA.

Une investigation indépendante demandée par la NCAA sur la procédure d’enquête autour du scandale Shapiro à Miami, dont vous trouverez les conclusions en intégralité ici, confirrmait lundi que l’ancien directeur d’enquête Ameen Najjar avait été contacté par l’avocate de Shapiro qui lui proposait le deal expliqué ci-dessus, qu’il avait transmis cette proposition à ses supérieurs, Julie Roe Lach et Tom Hosty, qui avaient accepté la proposition de l’avocate, bien que les instances compétentes au sein de la NCAA aient déconseillé d’accepter le deal. L’avocate de Shapiro a ainsi été payée dix huit mille billets verts pour son ‘assistance’. Ameen Najjar pensait pouvoir arguer du fait que l’avocate n’avait pas été ‘engagée’ par la NCAA, mais simplement payée pour une prestation… Ahem… Law and Order ? Give me Alana DeLaGarza every day, and twice on Sundays !

Julie Roe Lach. Non merci, madame...


En attendant, Julie Roe Lach a été virée par la NCAA, pour avoir refusé de suivre le conseil des juristes de la NCAA de ne pas s’aventurer dans le délire total de payer une avocate pour récupérer des témoignages.

La révélation de ce nouveau scandale issu du scandale Shapiro n’est qu’un clou de plus dans le couvercle du cercueil de la respectabilité de la NCAA en tant qu’institution. D’autres clous avaient été plantés avant, par exemple… Najjar lui-même avait été viré en mai dernier. Et le directeur des enquêtes disciplinaires (qu’on regroupe sous le terme ‘enforcement’ à la NCAA) avait démissionné à la surprise générale en 2012, huit mois après avoir pris ses fonctions. Et, tiens, dans le basket universitaire, un enquêteur avait, lui, été viré pour avoir eu un comportement non approprié dans une investigation autour d’un joueur de UCLA.

N’oublions pas non plus que sur les derniers mois de l’investigation autour des Hurricanes, on apprenait par exemple que des investigateurs auraient menacé des témoins potentiels (anciens joueurs et coachs) de tenir les propos rapportés par Shapiro à leur encontre comme vrai s’ils refusaient de venir témoigner devant les enquêteurs… Les mêmes types qui ont affirmé un moment qu’ils considéraient un fait établi si Shapiro avait évoqué ce fait deux fois au cours de l’enquête. Une parodie de justice !

La NCAA qui est à la fois procureur, juge et jury dans des cas comme celui de Miami s’est totalement décrédibilisée dans l’affaire.

Au milieu de tout ce foutoir, que le président de la NCAA Mark Emmert a caractérisé de ‘débacle’, il reste que le cas de Miami n’est toujours pas tranché. Même si l’on a pu espérer, pendant un court instant, que le scandale dans le scandale pousserait vers une résolution rapide du cas avec une limitation des pénalités infligées aux Hurricanes.

Oui, Mark Emmert, avec une dimension pareille,
nous comprenons ta douleur...

Un des représentants du cabinet d’avocats chargé de l’investigation indépendante sur l’enquête demandée par la NCAA mentionnée plus haut affirmait que le fait d’exclure les témoignages reçus en payant l’avocate de Shapiro dégonflaient le dossier d’environ 20% de sa substance.

Vous aussi, vous êtes allés (un peu) à l’école, et vous vous dites donc qu’il reste à peu près 80% de substance… Pas sur du tout… et c’est là que le génie de la communication de la présidente Shalala entre en ligne de compte, quelque peu…

Dans le communiqué qui aura donné le titre de l’article que vous êtes en train de lire, Donna Shalala (aucun lien avec le générique d’Intervilles) peut ainsi reconnaître qu’il y a bien eu faute de la part de l’Université de Miami, mais seulement pour les éléments qui sont établis par témoignages ou preuves matérielles dans le dossier, en préambule. Avant de s’en donner à cœur joie :

  • Miami s’est déjà suspendue de deux bowls sur les deux dernières saisons. Et a également refusé de participer au championnat de l’ACC en 2012 (et s’est donc privée du droit de se faire botter l’arrière train par les Seminoles pour la deuxième fois de l’année). La punition serait suffisante par rapport à ce qu’il resterait dans le dossier.

  • La plupart des accusations ne reposent que sur les propos d’un type (Shapiro) qui a fait sa fortune grâce au mensonge.

  • La plupart des faits énoncés dans les médias (et dans l’article d’il y a deux ans et demi d’un blogueur pas drôle, donc) ne sont pas repris dans la NOA. Beaucoup de bruit pour rien…

  • Les investigateurs de la NCAA ont négligé d’interroger des témoins de confiance, qui auraient pu apporter un jour nouveau à l’enquête, dont notamment Paul Dee. Décédé en 2012, Paul Dee a été le Director of Athletics de Miami. Avant de devenir… le président du Committee of Infractions qui a jugé le cas de Southern California (avec de belles sanctions à la clé) autour de l’affaire Reggie Bush.

  • La NCAA est responsable d’avoir laissé fuiter des éléments de l’enquête dans les médias, alors que ces éléments n’étaient de toute façon pas prouvés.

Et c’est là un énorme coup de pub, ou de bluff. Et ça rajeunit les vieux briscards comme moi qui ont connu la fin de la période de gloire de ‘The U’. Il y avait tout ce que ça comportait, d’être ‘The U’. The U, à l’époque, c’était un peu ce qu’incarnaient les Los Angeles Raiders en NFL. Une équipe de sales gosses doués, des mauvais garçons, mais soudés et fiers d’affirmer que c’était ‘Nous contre le Monde Entier’.

Après tout, des fans de Miami se sont bien amusés à éditer des tee shirts proclamant : ‘The U Invented Swagger’, à l’époque…



Et de voir aujourd’hui Miami, une des facs les plus détestées des Etats-Unis, par un paquet de fans des autres grandes facs sportives en particulier, se trouver dans une position de victime et pouvoir en jouer a un sel bien particulier au palais des fans de The U. Une enquête finalement un peu en bois dans beaucoup de ses dimensions, qui s'est éternisée, donnant à tous ceux pour qui The U veut dire quelque chose l'impression d'une forme d'acharnement autour de la fac pour laquelle notre cœur bat, encore et toujours.

La NCAA s’est une nouvelle fois ridiculisée (la grandiloquence dans le traitement de l’affaire Penn State était déjà passablement ridicule, pas dans les actes mais dans les postures, la fabrication ou presque de preuves dans le cas de Bush à USC, etc…).

Il est grand temps pour l’institution d’adapter son fonctionnement, pourquoi pas en confiant la phase d’investigation à des cabinets d’avocats, ce qui lui permettrait aux yeux du monde de conserver une certaine 'pureté' qui viendrait de la 'séparation des pouvoirs' qui en découlerait ? Ou en ajoutant plus de transparence pour le public sur le déroulement des investigations ? 

Ou tout simplement en venir à renoncer à l’amateurisme marron, aux scandales en série qui en résultent, en laissant les athlètes qui ne sont pas des étudiants au sens premier du terme (enfin, pas tous…) recevoir une compensation financière autre que le paiement du coût des études (n'oublions pas que la majorité des joueurs sont issus de milieux populaires) pour leurs performances athlétiques, et de reconnaître enfin que le beau rêve (auquel certains dans et hors l’institution croient toujours) de l’amateurisme et du sport pour le sport n’était finalement rien d’autre qu’un vœu pieux n’ayant aucune chance de perdurer à l’époque des méga-conférences et des méga-contrats télé à laquelle nous vivons ?

De là à dire que The U a inventé la télé...


Oublions aussi que l’amateurisme revendiqué de la NCAA tenait avant tout à un avantage fiscal pour l’Association… Et que c’est pour ça, donc, que des représentants de l’Association se comportent comme des loubards de séries télé, pour préserver une chose en laquelle, je pense, ils croient vraiment, l'amateurisme et ses vertus. Approche-t-on du fanatisme ? Peut-être...

Alors, oublions, attendons encore au moins trois mois de savoir quelles seront les sanctions prises par la NCAA à l'encontre de Miami. Nous allons souffrir, encore. Comme si l'humiliation de voir un type originaire de la région, Mario Cristobal, à qui Al Golden venait de donner l'opportunité de rebondir après qu'il ait été renvoyé de FIU en tant que head coach assistant chez les Hurricanes abandonner le navire à la première opportunité pour rejoindre... Alabama, ne suffisait pas à nous faire nous sentir un peu plus minables encore...

We have suffered enough.



We are The U.









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